Le bassin versant
Les cours d’eau qui passent dans notre Municipalité transportent souvent de l’eau qui provient des environs immédiat mais également de plus loin en amont. Cette eau provient de la pluie et de la fonte des neiges, mais lorsque la pluie tombe ou que la neige fond, l’eau ruisselle sur le sol, que ce soit à l’intérieur des secteurs résidentiels, industriels, commerciaux, forestiers ou agricoles. Tout ce réseau de ruisseaux et de rivières est alimenté par une portion de territoire que l’on appelle bassin versant.
Le bassin versant est en fait le territoire dont toutes les eaux de surface s’écoulent naturellement vers un même point appelé exutoire du bassin versant (voir la figure 1a). Le bassin versant comprend tous les éléments – vivants et non vivants – qui se trouvent à l’intérieur de ses limites, y compris le sol, la végétation, les animaux, les êtres humains, les eaux de surface et les eaux souterraines.
Un bassin versant remplit plusieurs fonctions importantes dans nos vies. Citons les fonctions hydrologiques, écologiques et socioéconomiques.
Ses fonctions hydrologiques
Un bassin versant remplit trois fonctions hydrologiques :
- Premièrement, il recueille l’eau qui provient de l’atmosphère sous forme de pluie et de neige. Cette eau a en principe une capacité maximale de s’infiltrer dans le sol. Plusieurs facteurs influencent le taux d’infiltration, y compris le type de sol, la topographie, le climat et la couverture végétale.
- Deuxièmement, un bassin versant accumule une certaine quantité de l’eau qui tombe à l’intérieur de ses limites, une fois que celle-ci s’est infiltrée dans le sol. Lorsque les sols du bassin versant sont saturés, l’eau percole plus en profondeur dans le sol, où elle alimente les aquifères d’eau douce, ou ruisselle à la surface du sol. Le type et la quantité de végétation et la structure des végétaux peuvent influencer la capacité d’emmagasinement d’un bassin versant. La masse des racines des plantes augmente la perméabilité du sol et permet à l’humidité de percoler profondément dans le sol où elle est emmagasinée.
Troisièmement, un bassin versant fait circuler l’eau à travers le sol vers les sources, puis vers les ruisseaux, les rivières, les lacs et les océans. Les taux d’écoulement lents sont préférables aux taux rapides, qui provoquent des crues rapides et majeures. Les événements orageux qui génèrent des taux de ruissellement élevés peuvent provoquer des inondations, l’érosion du sol et le transport des sédiments par les rivières.
À la suite de son « voyage » dans le bassin versant, l’eau des précipitations retourne à l’atmosphère par évaporation, grâce à un processus appelé cycle de l’eau (ou cycle hydrologique). Le cycle de l’eau, qui fonctionne comme une pompe gigantesque, explique le mouvement constant de l’eau de l’atmosphère à la Terre, puis de la Terre à l’atmosphère, par évaporation et transpiration sous différentes formes de précipitations (voir la figure 1b). Il n’a ni commencement ni fin.
La chaleur du soleil fait évaporer l’eau de la surface de la végétation, du sol ou des plans d’eau (fleuves, lacs, océans, etc.) et cette eau retourne dans l’atmosphère à l’état gazeux. La vapeur d’eau se condense au contact des masses d’air froid, ce qui entraîne la formation de nuages, lesquels apportent des précipitations sous forme de pluie, de neige ou de grêle.
Grâce à la phase terrestre du cycle de l’eau, toutes les parcelles du territoire délimité par le bassin versant sont reliées entre elles. Par conséquent, toutes les activités qui se déroulent dans un bassin versant et tous les processus physiques, chimiques et biologiques qui leur sont associés sont reliés entre eux. Chaque geste qui est posé sur le territoire à un endroit donné a un effet positif ou négatif sur le réseau hydrographique. C’est pour ces raisons qu’un bassin versant doit être géré comme une unité entière, étant donné que chaque parcelle du territoire a un rôle important dans la santé globale du bassin versant, et donc, dans la préservation des usages de l’eau.
Fonctions écologiques
Un bassin versant remplit au moins deux fonctions écologiques (Black, 1997) :
- Il procure des sites d’échanges et des mécanismes essentiels pour le bon développement des réactions chimiques nécessaires aux organismes vivants
- Il procure un habitat à la faune et à la flore. Les perturbations causées par l’homme sur les caractéristiques physiques, chimiques et biologiques de l’eau ont parfois des effets négatifs sur les écosystèmes ainsi que sur la faune et la flore, pouvant aller jusqu’à mettre en péril toute la chaîne alimentaire, non seulement de la vie aquatique, mais aussi celle des humains. Un bassin versant est un milieu potentiellement fragile qui doit absolument être préservé pour notre survie en tant qu’espèce humaine.
Fonctions socioéconomiques
Un bassin est un milieu de vie. Peu importe où vous résidez, que ce soit proche ou loin d’un cours d’eau, d’une rivière ou d’un lac, vous résidez dans un bassin versant. Depuis les civilisations anciennes jusqu’à nos jours, les bassins versants ont été le siège de la vie, qu’elle soit humaine, animale ou végétale. Un bref regard sur l’histoire démontre la relation étroite qu’il y a entre la stabilité d’un groupe de personnes, son économie, son développement social et la disponibilité de l’eau (Newson, 1988; Smith,1969).
Cela est particulièrement vrai au Québec, où l’implantation humaine est associée aux cours d’eau. Les premiers établissements (Québec, Montréal, Trois-Rivières et Gaspé) ont été fondés le long du Saint-Laurent. Par la suite, les ancêtres des Québécois ont remonté les principaux affluents du Saint-Laurent pour fonder des villes en bordure ou à la confluence des rivières, notamment Sherbrooke, Saguenay et Gatineau. C’est grâce aux ressources hydriques que le Québec a pu prendre son essor industriel aux XIXe et XXe siècles dans les domaines du textile, des pâtes et papiers, de l’électrochimie, des alumineries et de l’hydroélectricité. Le réseau hydrologique a donc conditionné l’implantation humaine et le développement économique du Québec.
Impacts du développement des municipalités sur les ressources en eau
La conversion des terres vierges en propriétés résidentielles, commerciales et industrielles a un impact important sur les ressources en eau (Horwitz et autres, 2008; White et Greer, 2006; Coles et autres, 2004). Elle modifie la circulation de l’eau, aussi bien de surface que souterraine, dans le bassin versant ainsi que sa qualité. À mesure que le bassin versant est développé, les arbres, les arbustes, les buissons et les autres plantes sont remplacés par des surfaces imperméables (rues, routes, toits, trottoirs, stationnements et autres surfaces compactes) qui empêchent l’eau des orages de s’infiltrer dans le sol. Sans les plantes pour ralentir l’eau des orages, le débit d’eau de ruissellement augmente. Par conséquent, un moindre volume d’eau est emmagasiné dans le sol et un plus grand volume d’eau atteint les rivières pendant une courte période de temps. Cela provoque des inondations, mais diminue le volume d’eau dans les rivières en période d’étiage. La diminution de l’eau qui s’infiltre dans le sol peut abaisser le niveau de l’eau souterraine, ce qui à son tour peut causer localement un stress (volume d’eau insuffisant, hausse de la température de l’eau, etc.) aux cours d’eau qui dépendent d’un apport régulier d’eau et nuire à la vie de certains organismes aquatiques pendant une certaine période de temps.
L’augmentation du volume d’eau de ruissellement provoque aussi l’érosion des berges et du lit des cours d’eau, ce qui dégrade l’habitat des organismes aquatiques qui ont besoin d’une eau de bonne qualité pour se développer. Les sédiments entraînés par l’érosion des berges peuvent obstruer les branchies des poissons et bloquer la lumière nécessaire à la croissance des plantes aquatiques qui servent de nourriture et d’habitat à plusieurs organismes aquatiques. Les sédiments se déposent et s’accumulent au fond des canaux, des rivières, des lacs et des réservoirs, ce qui augmente les risques d’inondation et le besoin de dragage des canaux ou des lacs pour faciliter la navigation de plaisance ou commerciale. En plus de l’augmentation du volume d’eau provoquée par le développement résidentiel, commercial et industriel, l’eau de ruissellement contient aussi davantage de contaminants (métaux lourds, pesticides, fertilisants, etc.) qui atteignent les cours d’eau à la suite des précipitations.
En fait, toute activité qui change la perméabilité, le type et la couverture végétale, la quantité, la qualité ou le débit de l’eau à n’importe quel endroit d’un bassin versant peut changer les caractéristiques d’une rivière en aval. Concrètement, les pratiques d’aménagement du territoire telles que le déboisement et la construction de routes et de résidences peuvent avoir des conséquences néfastes importantes, même si ces aménagements ne sont pas situés près des cours d’eau. Il existe plusieurs techniques pour réduire les impacts du développement résidentiel, commercial et industriel sur les milieux aquatiques. Citons la réduction des surfaces imperméables au minimum possible, l’augmentation des surfaces boisées ou de végétation dense au maximum possible ainsi que les ouvrages de contrôle des eaux de ruissellement tels que les bassins de sédimentation. Cela dit, seule une planification intégrée de l’aménagement du territoire, mais à l’échelle de l’ensemble du bassin versant, peut aider à s’assurer qu’une activité ou un projet n’a pas des impacts environnementaux non désirés en aval, car la capacité de support des activités humaines par un bassin versant est limitée.
Définition et objet de la gestion intégrée de l’eau par bassin versant
La GIEBV est un processus qui favorise la gestion coordonnée de l’eau et des terres à l’intérieur des limites d’un bassin versant en vue d’assurer le bien être social et économique qui en résulte sans compromettre la pérennité d’écosystèmes vitaux. La GIEBV est née du constat selon lequel les problèmes qui touchent les ressources en eau sont de plus en plus liés à d’autres enjeux de développement, tels que la santé, les mines, l’énergie, le transport, l’agriculture, et aussi à des facteurs sociaux, économiques, environnementaux, légaux et politiques à l’échelle locale, régionale et nationale (Biswas, 2004). Plusieurs de ces problèmes sont devenus trop complexes, inter reliés et démesurés pour être gérés par une seule institution, peu importe l’autorité et les ressources qui lui sont attribuées, l’expertise technique et la capacité de gestion disponible, le niveau de soutien politique et toutes les bonnes intentions (Biswas, 2001).
La résolution des problèmes contemporains de l’eau nécessite la participation et l’implication de l’ensemble de la communauté qui réside dans un bassin versant, y compris les gouvernements (locaux, régionaux et nationaux), les industriels, les commerçants, les producteurs agricoles et forestiers et tous les citoyens.
Le concept de GIEBV est axé sur l’intégration, un terme qui n’est pas toujours bien compris par les praticiens et les acteurs de l’eau. On peut décrire la GIEBV comme un processus permettant d’intégrer plusieurs relations, à savoir les relations entre les eaux de surface et les eaux souterraines, la quantité et la qualité, les relations entre l’eau et les utilisations du territoire (environnement), les relations entre l’eau et les intérêts des parties prenantes ainsi que les relations entre les institutions sociales, économiques et politiques (Mitchell, 1990a).
« Intégrer », au sens de la GIEBV, peut donc être interprété comme l’établissement d’un lien entre plusieurs éléments (ex. : l’eau et les terres), la coordination de plusieurs éléments l’un avec l’autre jusqu’à l’obtention d’un tout cohérent (ex. : la coordination des activités de plusieurs organisations, la coordination des politiques et des programmes qui touchent les ressources en eau), la prise en compte des activités et des intérêts d’autres groupes de la société ou d’autres institutions (ex. : les activités des municipalités et les ministères du gouvernement), la mise en commun d’activités, de ressources et de savoirs, etc. L’intégration n’est toutefois pas une panacée et ne résoudra pas tous les problèmes qui touchent les ressources en eau; elle peut aussi être partielle dans le sens où il n’est pas nécessaire de tout intégrer (Cardwell et autres, 2006; Curtis, 2004). L’intégration n’est pas toujours requise ou même praticable. On peut utiliser un amalgame de lois, d’engagements politiques et de décisions administratives pour assurer l’intégration (Mitchell, 1990b).
La GIEBV est donc une approche de collaboration et de partenariat qui incite les acteurs de l’eau (les ministères du gouvernement, les municipalités, les municipalités régionales de comté, les producteurs agricoles et forestiers, les industries et les citoyens) à coordonner leurs activités et leurs décisions qui ont une influence directe ou indirecte sur les ressources en eau dans un bassin versant. L’approche de GIEBV traite à la fois de tous les problèmes qui touchent les ressources en eau ou qui leur sont associés : la qualité, y compris la qualité chimique, physique et biologique, la quantité, y compris les eaux de surface et souterraines, la diversité biologique, les habitats, les pêcheries, les activités récréatives, la santé, etc.
La GIEBV profite à tout le monde, aussi bien aux citoyens qu’aux secteurs public et privé. Les citoyens en bénéficient lorsque la qualité de l’eau des rivières, des lacs et d’autres plans d’eau s’améliore. Ils peuvent alors pratiquer des activités nautiques sans risques, aller à la pêche sportive ou simplement se prélasser près d’un plan d’eau tout en admirant la beauté du paysage. Le secteur public (municipalités, municipalités régionales de comté, ministères du gouvernement, etc.) en bénéficie parce que, grâce à la coopération et la collaboration – deux leitmotiv de la GIEBV –, les agences publiques peuvent faire plus que lorsqu’elles agissent seules avec leurs ressources limitées. L’ouverture d’esprit et la confiance qui se développent progressivement du travail en commun font que l’on permet à ceux qui sont les plus familiarisés avec les problèmes et les solutions possibles de jouer un rôle accru dans l’intendance du bassin versant. Le secteur privé en profite aussi du fait que les coûts de protection des ressources en eau, pour ne citer que cet exemple, peuvent être partagés équitablement entre les responsables des activités qui génèrent la pollution.
Mise en œuvre de la gestion intégrée de l’eau par bassin versant
La GIEBV est un concept très large. Chaque pays l’applique en l’adaptant selon la nature et l’intensité des problèmes liés à l’eau, les ressources humaines et financières, les capacités et les responsabilités des institutions, les forces et les faiblesses relatives des acteurs de l’eau, le paysage culturel et politique ainsi que les conditions naturelles qui lui sont propres.
Le Québec a choisi d’étendre graduellement la GIEBV à l’ensemble de son territoire. Des 33 bassins versants prioritaires couvrant près de 20 % de la superficie de partie méridionale en 2002, nous sommes passés à un total de 40 zones de GIEBV couvrant la totalité du Québec méridional en 2009. Une zone de GIEBV regroupe généralement plusieurs bassins versants. La mise en œuvre de la GIEBV – donc la coordination des activités – dans chacune de ces zones a été confiée à un organisme de bassin versant (OBV).
Un OBV est une table de concertation à laquelle siègent des représentants des acteurs de l’eau (usagers et gestionnaires de l’eau présents sur le territoire du bassin versant) et de la société civile. Ainsi, les municipalités et chaque municipalité régionale de comté (MRC) sont représentées au conseil d’administration des OBV. Les représentants gouvernementaux sont membres à part entière des OBV, mais ils n’ont pas le droit de vote. L’organisme assure la concertation entre tous les acteurs de l’eau à l’échelle locale et régionale. L’OBV doit réaliser un plan directeur de l’eau (PDE) pour le bassin versant, consulter la population sur le contenu de ce plan, coordonner sa mise en œuvre et en faire le suivi. Le Cadre de référence pour les organismes de bassins versants prioritaires (Auger et Baudrand, 2004) stipule d’ailleurs que les OBV « ne doivent pas se substituer aux acteurs en place […] ». Il en résulte que c’est aux acteurs qui ont des responsabilités légales dans le domaine de l’eau (les municipalités, les MRC, les ministères du gouvernement) ou ceux qui sont soumis à des lois et à des règlements provinciaux (les producteurs agricoles et forestiers, certaines industries, etc.) qu’il revient de mettre en œuvre les projets qui permettront de corriger la plupart des problèmes déterminés dans un bassin versant.
L’Agence de Bassin Versant des 7 OSBL reconnu par le gouvernement, qui a pour mandat de protéger et d’améliorer la qualité de l’eau des sept bassins versants de son territoire, dont la rivière Blanche Ouest, la rivière Coulonge, Dumoine, Gatineau, Noire, Quyon et une partie des Outaouais (résiduel).
L’ABV des sept a élaboré un plan directeur de l’eau en 2014 pour l’ensemble de son territoire qui comprends la rivière Blanche Ouest. Il est clair qu’établir un premier PDE pour un territoire aussi vaste que celui de l’ABV des 7 est une tâche colossale et que le résultat en est un premier jet qui au cours des années verra un portrait de plus en plus étoffé. Les enjeux évoluent aussi au gré des changements climatiques, de l’augmentation de la population en milieu urbanisé et en territoire ciblé par le récréotourisme. Il y a six ans, la densification autour des lacs et la prolifération des inflorescences d’algues bleu-vert primaient; aujourd’hui quoique toujours sujets de l’heure ces enjeux se complexifient par l’arrivée de nouvelles espèces aquatiques envahissantes et les problèmes hydrologiques survenant à la suite d’épisodes climatiques hors du commun.
Une fois cet exercice complété, la fédération des lacs et la Municipalité de Val-des-Monts ont joint leurs efforts afin de produire un plan directeur de l’eau s’attardant au bassin versant de la rivière Blanche Ouest. L’objectif ultime, sans rien enlever au travail colossal de l’ABV des 7, est d’analyser le bassin versant de façon plus ponctuelle et à un niveau que nous pourrions qualifiés de micro.
La Politique nationale de l’eau (ministère de l’Environnement du Québec, 2002) prévoit que « chaque municipalité et MRC propose dans le PDE des actions à inscrire à ses plans et règlements d’urbanisme ou à son schéma d’aménagement ». Le PDE est un document stratégique de très grande importance pour la GIEBV. Son élaboration comporte quatre étapes, soit:
- l’analyse des problèmes qui touchent les ressources en eau (ex. : prolifération d’algues en période estivale, disponibilité en eau insuffisante)
- la détermination des enjeux
- la détermination des objectifs à atteindre
- l’élaboration d’un plan d’action (liste des projets et des actions qui permettront de résoudre les problèmes, comment ils seront mis en œuvre, quand et qui en payera la facture). Le PDE doit être d’une très grande qualité scientifique et technique. Il en va de la crédibilité des OBV auprès des acteurs municipaux, gouvernementaux et socioéconomiques et de la légitimité du processus de GIEBV.
Nécessité d’une collaboration étroite entre les élus municipaux, les organismes de bassin versant et les autres acteurs de l’eau
Les municipalités du Québec ont plusieurs responsabilités légales, directes et indirectes, dans la gestion de l’eau. Les responsabilités directes qui incombent aux municipalités locales sont l’application de la Loi sur le captages des eaux et l’évacuation et le traitement des eaux usées. Les responsabilités indirectes qui incombent aux municipalités régionales de comté (MRC) concernent la protection des eaux de surface contre la pollution, conformément à la Politique de protection des rives et du littoral, et l’encadrement de l’occupation de leur territoire grâce à des schémas d’aménagement et de développement (SAD), conformément à la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme. Dans les SAD et les règlements municipaux, les instances municipales peuvent fixer des règles ou des normes de lotissement supérieures à celles fixées par le gouvernement concernant la densité d’occupation du sol à proximité des cours d’eau. Utilisés en connaissance de cause, les SAD qui influencent le type et l’emplacement des activités humaines dans les bassins versants constituent un puissant outil à la disposition des municipalités pour influencer positivement la quantité et la qualité de l’eau dans les bassins versants. De plus, l’article 19 de la Loi sur les compétences municipales, par son énoncé général, permet à toute municipalité locale d’adopter des règlements en matière d’environnement, par exemple en ce qui concerne l’utilisation d’engrais sur les terrains privés.
Chaque MRC et chaque municipalité peut travailler seule de son côté à minimiser les impacts de l’aménagement du territoire sur l’eau, mais sans une approche concertée et intégrée, il y aura des risques que la capacité des bassins versants de supporter les activités humaines soit dépassée avant même que l’on s’en rendre compte. C’est déjà le cas dans plusieurs bassins versants du Québec, comme l’ont démontré Gangbazo et autres (2004). Or, les élus municipaux n’ont pas autorité sur les bassins versants, mais plutôt sur des territoires se situant à l’intérieur des limites d’un bassin versant ou chevauchant plusieurs bassins versants. De plus, certains problèmes résiduels de pollution des eaux de surface qui ont une incidence directe sur la qualité de l’eau brute destinée à la consommation humaine peuvent être causés par les activités dont le contrôle échappe aux élus municipaux. Il peut s’agir d’activités agricoles, forestières ou industrielles qui sont réglementées plutôt par plusieurs ministères du gouvernement québécois. Il en résulte que seule la collaboration de tous les acteurs d’un bassin versant qui ont des responsabilités dans le domaine de l’eau est essentielle pour gérer cette ressource d’une façon durable.
Conclusion
La protection des ressources en eau est un enjeu prioritaire de la gestion des ressources naturelles. En raison des nombreux biens et services qu’ils fournissent à la population, les bassins versants représentent un actif collectif d’une valeur inestimable. Cependant, les approches historiques de gestion de l’eau ont souvent ciblé le développement des bassins versants et des activités économiques aux dépends de la qualité et de la quantité de l’eau. Ces approches, qui imposent des coûts énormes à la société (Tegtmeier et Duffy, 2004), sont heureusement en train de changer.
La gestion intégrée de l’eau par bassin versant est une approche qui vise la coordination des activités, des politiques et des programmes qui touchent les ressources en eau dans un bassin versant. Les élus municipaux sont sur la ligne de front quant au contrôle public de l’aménagement du territoire, à cause des pouvoirs qui leur sont accordés par la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme. En travaillant avec les organismes de bassin versant, ils peuvent influencer le type et l’emplacement des activités humaines à l’intérieur du bassin versant et ainsi réduire les risques de pollution de l’eau. De la même façon, les élus municipaux peuvent contribuer à offrir à leurs citoyens un environnement sain, bref un milieu où il fait bon vivre. Il n’est nullement question d’empêcher le développement économique. Il s’agit plutôt de faire en sorte que ce développement soit planifié de manière à ne pas dépasser la capacité des bassins versants de fournir à la population des biens et des services en quantité et en qualité.
- Référence bibliographique, à utiliser pour citer le présent document : GANGBAZO, G. (2009). Pourquoi les élus municipaux ont-ils intérêt à collaborer à la gestion intégrée de l’eau par bassin versant? Québec, minis-tère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs, Direction des politiques de l’eau, ISBN 978-2-550-56104-0, 10 pages.